Rezension über:

Marian Helm / Saskia T. Roselaar (eds.): Spoils in the Roman Republic. Boon and Bane, Stuttgart: Franz Steiner Verlag 2023, 467 S., 4 Farb-, 7 s/w-Abb., ISBN 978-3-515-13369-2, EUR 84,00
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Rezension von:
Marianne Coudry
Université de Haute-Alsace, Mulhouse
Redaktionelle Betreuung:
Matthias Haake
Empfohlene Zitierweise:
Marianne Coudry: Rezension von: Marian Helm / Saskia T. Roselaar (eds.): Spoils in the Roman Republic. Boon and Bane, Stuttgart: Franz Steiner Verlag 2023, in: sehepunkte 24 (2024), Nr. 12 [15.12.2024], URL: https://www.sehepunkte.de
/2024/12/38821.html


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Marian Helm / Saskia T. Roselaar (eds.): Spoils in the Roman Republic

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Cet ouvrage collectif (23 contributions) présente les résultats d'un programme conduit à l'Université de Bochum à partir de 2015, à l'occasion d'un séjour de Saskia Roselaar, et conclu en 2018 par un colloque.

Partant du constat de l'omniprésence des prises de guerre (terme préféré à celui de "butin") dans l'espace urbain de la Rome républicaine, mais aussi sa société et sa culture, l'ouvrage a pour ambition de présenter un bilan des travaux récents sur les multiples aspects du phénomène, en dépassant la perspective étroitement économique généralement adoptée jusqu'à présent. Il offre une information très riche et en prise avec les questionnements actuels, notamment les travaux de N. Terranato sur la construction de l'hégémonie romaine sur l'Italie, et ceux de J. Tan sur la politique financière conduite par l'aristocratie. La période considérée s'étend pour l'essentiel du IVe au IIe siècle (20).

Son originalité tient à deux choses. Il s'efforce, d'abord, de surmonter la fragmentation de la plupart des études antérieures, organisées autour de thèmes spécifiques : modes d'acquisition et de distribution du butin à différentes catégories de bénéficiaires, formes de prélèvement sur les vaincus (indemnités, fiscalité provinciale), utilisation des terres confisquées et modalités de la colonisation en Italie, rôle du butin dans l'auto-représentation des élites, ou, plus largement, lien entre profits de guerre et dynamique de la conquête. C'est au contraire une vision d'ensemble qui est proposée ici, à partir d'une définition extensive des prises de guerre (18) - toute ressource obtenue par la contrainte dans l'aire géographique de la domination romaine -, ce qui permet d'intéressants recoupements entre différentes contributions dont les angles de vue se croisent. Ensuite, l'ouvrage propose une vision dynamique des phénomènes : non seulement le plan général distingue la période des débuts de la République de la suivante, mais dans toutes les contributions les auteurs portent une grande attention aux changements.

La structure est en partie chronologique, en partie thématique : après une partie introductive, qui présente les enjeux de l'ouvrage (réflexion stimulante de N. Rosenstein sur les circuits de la redistribution des profits de guerre et leur rôle dans la prospérité de Rome) et résume les contributions (20-27), deux textes liminaires permettent d'évaluer la spécificité du cas romain, en évoquant l'univers homérique (S. Frass) et la pratique macédonienne (M. Kleu). Puis une première partie est consacrée aux Ve et IVe siècles, tandis que les contributions qui concernent la période médio-républicaine forment l'essentiel du livre, et sont regroupées selon plusieurs grandes rubriques, la dimension symbolique du butin formant une partie finale.

Les contributions elles-mêmes, qui toutes présentent la même qualité scientifique, sont assez variées dans leur ambition. Certaines sont focalisées sur des sujets étroits, explorés de façon scrupuleuse, mais aux résultats nécessairement limités, et pas toujours nouveaux : par exemple A. Bertrand sur le lien entre conquête et fondations coloniales en Italie fin IVe-début IIIe siècle ; M. Helm sur l'évolution des modes de prédation dans les guerres romaines du IVe siècle ; S. Lentzsch sur le rôle du pillage dans les opérations de la deuxième guerre punique en Italie, côté romain et côté carthaginois ; M. K. Termeer sur les liens éventuels entre butin et débuts du monnayage romain ; M. García Morcillo sur les aspects matériels, économiques et juridiques de la vente du butin sur les théâtres d'opérations ; K. P. D. Huemoeller sur les prisonniers de guerre ; ou encore L. Pfuntner sur les prises et restitutions d'oeuvres d'art aux cités de Sicile.

D'autres embrassent des sujets plus amples et présentent des récapitulations solides de données déjà connues, mais présentées ici de façon rigoureuse et actualisée, comme J. Rich sur le devenir des prises de guerre rapportées à Rome (avec de très utiles tableaux) ; G. Cabezas-Guzmán et T. Ñaco del Hoyo sur le rôle des prises de guerre pour financer les opérations romaines en Hispanie ; ou K.-J. Hölkeskamp sur les innovations par lesquelles la nouvelle élite patricio-plébéienne imprime sa marque dans l'espace urbain de Rome et crée une culture politique particulière.

D'autres encore brassent des questions de fond de manière novatrice et très stimulante, mais avec une grande part d'hypothèses, comme S. Roselaar qui livre une analyse très fine et argumentée de la façon dont les Romains ont organisé leur domination en Italie par la colonisation aux IVe et IIIe siècles ; ou encore J. Armstrong et P. Vanderpuy qui tentent de déterminer le rôle de la répartition du butin et de l'attribution des terres conquises dans les évolutions politiques et territoriales de la Rome des débuts de la République.

Quelques contributions, cependant, présentent à un lien trop lâche avec le thème des prises de guerre : celle de B. Jordan sur la non-exploitation fiscale de la province d'Asie avant Sylla, qui en outre avance des hypothèses à mon avis excessivement fragiles. Même fragilité pour celle de M. Taylor qui tente de mettre en rapport l'évolution du tributum, celle des dépenses militaires et celle des revenus de la guerre en se livrant à des calculs hautement spéculatifs ; celle de J. R. Patterson sur le rôle éventuel du butin dans le financement des équipements routiers et portuaires de l'Italie ; celle de F. Gauthier sur la place de l'attente du butin parmi les motivations des soldats à accepter le service ; ou enfin celle de M. P. Fronda sur l'exhibition du butin des guerres lointaines en Italie au retour des armées.

En conclusion : cet ouvrage présente de nombreux points forts. En premier lieu la qualité scientifique des contributions : toutes, qu'elles traitent des sujets limités ou brassent des questions de fond, et même si elles apportent peu de nouveauté, présentent une information solide, reposant sur une bibliographie consistante et à jour. Certaines sont particulièrement stimulantes (Rosenstein, Roselaar, Vanderpuy), et celles dont j'ai souligné la fragilité ont le mérite d'appeler des discussions futures. Ensuite la réflexion collective conduite sous l'égide des éditeurs est très aboutie, et elle donne à l'ensemble une forte cohérence. Elle permet notamment de retrouver les mêmes questions de fond dans des contributions différentes, avec un croisement des perspectives enrichissant (e.g. Armstrong et Taylor sur les liens entre prises de guerre, stipendium et tributum dans les débuts de la République ; ou Vanderpuy, Bertrand et Roselaar sur la distribution des terres confisquées). Enfin, dans tout le volume on retrouve une attention remarquable aux évolutions, avec le souci d'identifier des tournants historiques : la guerre latine (Roselaar), les guerres samnites (Helm), les guerres puniques (Termeer), Sylla (Jordan).

Un regret : les représentations ayant trait aux prises de guerre et aux façons de les acquérir (pillage, sièges, asservissement des vaincus) sont peu explorées, et il faut attendre la dernière partie du volume pour qu'elles soient abordées, dans trois contributions seulement. Enfin, la navigation entre différentes contributions traitant de questions ou d'événements identiques - dont on a souligné que c'était un point fort du livre - aurait été grandement facilitée si le lecteur avait pu s'appuyer au moins sur un index des noms propres, et sur un index des sources.

Marianne Coudry